vendredi 9 octobre 2009

La presse I koz

Culture

André Robèr le K’A marginal de l’édition

CLICANOO.COM | Publié le 8 octobre 2009

Il est revenu à la Réunion spécialement pour l’occasion. Dix ans d’éditions par coeur (sans subvention) pour mettre l’écriture créole en l’air. Bon anniversaire à André Robèr que vont célébrer, samedi au Port, ses auteurs. On est tous invités pour fêter ce K’A-là.

Comment vous est venue l’idée d’éditer ?
André Robèr : Un soir de folie ! Quand un zoreille en zone occupée m’a dit qu’il n’y avait pas de culture créole ! Mon sang de palmiplainois n’a fait qu’un tour. Et tout seul, avec mes sous à moi, je me suis lancé en éditant les premiers CD de poésie. Carpanin Marimoutou m’a rejoint, est devenu mon directeur littéraire. Poésie essentiellement. Pour le roman, on ne voulait faire d’ombre au “docteur la tête” (Jean-François Reverzy) qui avec son Grand Océan faisait un travail considérable pour les lettres créoles. Mais quand sa maison d’édition s’est progressivement retirée, malgré nous, on a dû monter en puissance vu qu’il n’y avait plus d’éditeur pour le roman créole.
Un sacerdoce ?
Un boulot de militant, de fourmi aussi, ( je fais tout moi-même) et pas mal de “dalonnage” pour défendre le créole et aussi les langues menacées, comme le malgache, avec l’an dernier la publication des contes malgaches de Jean-Luc Raharimanana. C’est un geste politique, oui. Et en ce qui concerne ma langue natale, j’ai le désir de toutes les graphies tangol, kwz arrangé, 77 amélioré ou comme moi du n’import’ kwé aligoté. C’est le fait d’écrire en créole réunionnais qui m’intéresse.
Et ce qui vous navre ?
L’absence de fonds local chez les libraires pour accueillir notre production, l’absence d’aide à l’écriture parce qu’elle est créole. Sauf si je promets d’écrire en français quand c’est le créole que je cherche à promouvoir pour le faire exister ! Alors je publie tout seul. En dix ans ? La collection “Astèr” (treize DC audio) , la collection “Pou koméla” qui reprend les textes fondateurs du créole réunionnais (six ouvrages aujourd’hui), la collection “Roman” depuis deux ans (trois titres pour l’heure). Et comme il n’y a pas de culture sans pensée et sans analyse, on a aussi créé la collection “Méné”, pour mettre à la disposition du grand public les travaux universitaires (DEA et thèses) sur les enjeux de l’espace culturel réunionnais (déjà trois titres).
Et à nouvel anniversaire, nouveaux titres ?
Pour l’occasion, on sort “Avioner” d’Alain Gili, “Babrius” de Jean-Louis Robert qui s’est mis à traduire des contes grecs en créole, “Cahier d’un retour impossible au pays natal”, de Khal Torabully, drôle et touchant. Et puis, nous avons le grand honneur de saluer le retour en écriture de Carpanin Marimoutou dont on publie “A.R” et “Shemin maniok, shemin galé”. Ce dernier parlant de sa vie, pas celle du brillant intello, mais de ses douleurs persos. Très émouvant.
Vous recommandez lequel ?
C’est tout’ mon band’ famille ! On peut pas me demander lequel je préfère !
Que lisez-vous quand vous mettez les manuscrits du K’A de côté ?
Maintenant que la retraite me guette je vais avoir davantage de temps pour lire. J’ai commencé, avec la correspondance de Guy Debord (NDLR : situationniste révolutionnaire) et je me suis attaqué aux derniers bouquins de Raymond Roussel (NDLR : surréaliste avant l’heure) que je n’avais jamais lu.
Tout pour plaire à l’ancien animateur de radio Libertaire que vous êtes. Dernière question : le maloya, patrimoine mondial de l’humanité ?
Ça montre qu’on ne perd pas à chaque fois ! Seulement, constat : la reconnaissance vient de l’extérieur parce qu’ici on ne s’est même pas aperçu de l’importance d’un tel patrimoine. A cet égard, je tiens à souligner le travail accompli par Carpanin Marimoutou qui a ficelé le dossier. Car même s’il œuvre au sein d’une institution, il n’avait a priori aucune chance en face de la gastronomie et de la joaillerie proposées sur le plan national. Mais l’UNESCO a été capable de faire la différence et de reconnaître ce que cette musique de la transmission a de capital
Propos recueillis par Marine Dusigne

“Kabar dix ans”, c’est gratuit samedi
Rendez-vous au Kabardock Café, samedi 10 octobre en fin de journée, pour des agapes littéraires longue durée en trois temps animés par Didier Ibao et Mikale Kourto. Première partie autour du livre “Rougay le mo” qui réunit les écrivains Boris Gamaleya, Claire Karm, Mikael Kourto, Partrice Treutahrdt, Stéphane Hoarau, Jean Louis Rober Lolita Monga, Sergio Grondin, Francky Lauret, Jean Lods, Carpanin Marimoutou, Teddy Iafare Gangama et aussi Babou B’Jalah, Céline Huet, Alain Gili,Nikola Ragoonauth, Anny Grondin, qui viendront lire leur texte avec Dédé Lansor en apothéose musicale. Break pour un drink et deuxième tableau avec présentation des autres publications du moment plus Lao pour rythmer la manœuvre. Et pour le final, participation des pintades de lantouraz kabar et K’A en particulier, avec Rachel Pothin, Arlette Nourly et Lolita Tergemina en lectrices privilégiées. Et Danyel Waro pour finir la soirée en beauté.

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